La lame de James
A bout de souffle, James pose les mains sur ses genoux et respire profondément. Une main se pose sur son épaule, c’est un homme – un humain. James le regarde heureux de constater qu’il n’est plus seul. Cependant, l’homme ne montre pas son visage. Il porte une armure, un casque, une cape, de larges bottes et il tient une torche dans une de ses mains. Il ressemble à un chevalier ou du moins un piètre chevalier car son armure est loin d’être soignée. James entame le dialogue.
- Je ne rêve pas ! Vous êtes un humain ?
- Oui mais chut ! Attention ne parlez pas trop fort il pourrait nous entendre…
- Qui ça ? Les rats ?
- Vous l’avez échappée belle. C’est vous qui avez fait tout ce bruit ? Que c’est-il passé ?
- Je suis arrivé en ville il y a peu de temps et je pensais y trouver de la vie humaine mais j’ai découvert ces affreux rats et l’un d’eux a voulu me tuer. J’ai fais tout ce que j’ai pu pour lui échapper, j’ai glissé, je suis tombé, bref… Me voici et merci de m’avoir appelé au loin.
- C’est bien la première fois que quelqu’un leur échappe… Mais d’où venez-vous ?
- De très loin. J’ai erré pendant longtemps dans les montagnes et les rochers qui entourent la ville. J’étais perdu et prisonnier de ce monde tout en cherchant une sortie mais surtout un retour vers la ville. Certes je ne vous ressemble pas mais je vous jure que je suis né ici ! Malheureusement… le paysage n’est plus ce qu’il été.
- Comment dois-je vous appeler ?
- James
- Suivez moi James, nous devons nous mettre en route. Nous ne sommes pas en sécurité ici. Je vais tout vous expliquer.
Le chevalier ne lui a jamais dit son nom. Il expliqua à James qu’un étrange phénomène avait modifié toute la ville et ses habitants. Un épais brouillard c’était abattu sur la ville, si épais qu’il était impossible d’y voir au travers. Privé de lumière, les humains commencèrent par tomber malades. Le manque de chaleur et l’humidité ambiante ont fait perdre la tête à beaucoup d’entre eux, les hôpitaux regorgés de patients. Gravement déprimés, beaucoup d’entre eux décidèrent d’en finir plutôt que de vivre dans un monde maussade et gris puis vint les rats. Plus les morts était nombreux, plus leur nombre augmenté. Au début, ils étaient petits puis au fur et à mesure ils grandirent jusqu’à atteindre des tailles humaines ou celles des chiens. Supérieurs en nombre et dotés d’une intelligence hors du commun, il s’organisèrent et prirent le contrôle de la société. Un monde barbare et violent où le peu d’humain restant étaient devenus les proies de ces bêtes féroces. Les humains décidèrent d’une contre attaque mais elle fut sans succès. A force de mutation les rats étaient invulnérables face à leurs armes. Il fallait revenir à l’ancien temps, comme au moyen âge, et porter des armures afin de ne pas être transpercé par leurs griffes et leurs crocs. Abdiquant face à une telle situation, les humains décidèrent de se réfugier sous terre. Par chance, les rats avaient creusé tellement de tunnels qu’il était facile de s’y cacher. Vivant dans les ténèbres, ils perdirent la vue et seul quelques uns sont habilités à voyager sous la terre en quête d’autres survivants, de nourritures ou d’une solution qui pourrait exterminer les rats.
Glacé par ce récit, James comprit qu’il été peut être trop tard. Lui qui avait tant espéré retrouver un monde joyeux et sans soucis. Etait-il possible de revenir en arrière ? Faire en sorte que toutes ces horreurs ne soient jamais arrivées ? Le chevalier lui expliqua qu’il cherchait des solutions depuis des années mais il n’avait rien trouvé. Tout en regardant la cape de James, il demanda ce qu’elle pouvait bien cacher. James lui raconta son étrange récit à propos de celle-ci, il lui raconta ses propriétés « magiques » soudain le chevalier s’arrêta sur le crayon de James.
- Ceci pourrait vous servir. Vous pourriez dessiner une carte des tunnels et m’accompagner ?
- Compte tenu de la situation ce sera avec plaisir mais je n’ai plus de papier.
- J’en ai, ne vous inquiétez pas. J’ai toujours aimé voyager et découvrir des choses improbables. On peut dire que vous êtes particulier James…
- Beaucoup le pense, c’est vrai.
- Si par mésaventure nous croisions un rat, pointez votre crayon vers celui-ci, il pensera que c’est une lance et il fuira.
- En êtes-vous sûr ?
- D’après vous, qu’est-ce qui pourrait les tuer ?
- Je n’en sais rien. Nous avons tout essayé : les gaz, les flingues, le feu, les poisons, etc. Rien ! Mais j’ai quelques hypothèses à ce sujet.
- J’aimerai les entendre ?
- J’ai souvent remarqué que les rats fuyaient la lumière, comme toutes bêtes sauvages me direz-vous, mais ils s’échappent surtout dès qu’on pointe quelque chose vers eux, du moins ils craignent ce geste.
- Vous vous êtes déjà battu avec des rats ?
- Oui et ce n’étais pas glorieux. Heureusement que mon armure m’a protégé. Vous sentez cette odeur ?
- Oui je sens. C’est horrible !
James et le chevalier s’arrêtèrent brusquement tout en sentant une odeur nauséabonde qui émanait du tunnel. Une odeur de mort. Une odeur de charogne. Pas question de rebrousser chemin car ce tunnel était la seule route possible pour regagner la surface ou un campement. Tout en se bouchant le nez, il pénètre dans une large salle ou se dresse des piliers de pierres qui forment un parcours.
- Je n’ai jamais rien vu de tel ! C’est un nouvel endroit
- Regardez, là tout en bas.
James montre du doigt le sol. Il est si loin, la moindre chute leur serait fatale. Dans l’obscurité, le chevalier constate que le sol est jonché de cadavres de rats. Des chairs mortes s’échappent des gaz putrides qui feraient pâlir les âmes sensibles.
- Impossible ! Autant de rats morts, c’est incroyable. Il existe bel et bien un moyen de s’en débarrasser.
- Il faut croire. Laissez moi utiliser ma cape pour franchir ce gouffre. Je suis plus agile que vous il me sera facile de sauter de pierre en pierre pour atteindre l’autre côté. Une fois que j’y serais je vous ferais un signe pour vous indiquer que la voie est libre.
- Bien James. Prenez cette torche.
James bondit sur le premier pilier. Armé de sa torche il y voit plus clair. Il saute avec prudence quand tout à coup, une chose brillante attire son œil. Plus bas, au beau milieu des cadavres se trouve une large lame, une sorte de couteau, empalé dans un rat. Il se retourne et crie vers le chevalier.
- J’ai découvert quelque chose !
- Qu’avez-vous découvert ?
- Une arme je crois, elle est plantée dans un rat. Je vais descendre la chercher.
- Prudence James.
James descend le long du pilier et se retrouve tout prêt du couteau. Il tend sa main pour le saisir mais celui-ci est profondément enfoncé dans la carcasse de la bête. Il tire un coup sec, la lame sort et le rat s’effondre puis roule sur ces congénères. Un bruit se fait entendre…
- James ! Prenez cette lame et fuyez ! Les rats arrivent je les entend je vais les retenir.
- Quoi ! Non attendez je reviens pour vous aider !
- Non ! Fuyez ! le campement n’est pas loin d’ici. Allez retrouver les autres humains, ils en sauront peut être plus sur cette lame.
- Bien mais promettez moi que nous nous retrouverons.
- J’ai survécu jusqu’ici, je continuerais à survivre. Allez-y maintenant partez !
James remonte rapidement le pilier tout en mettant le couteau sous sa cape. Il poursuit son chemin et arrive à l’autre bout de la salle. Il se retourne. De l’autre coté du gouffre le chevalier fait face à deux rats. Il brandit sa torche pour les faire reculer mais la flamme vacille de plus en plus. James sent que tout son corps souhaite se battre et tester le couteau sur les abominables créatures mais il sait que le chevalier veut se battre seul. Il détourne le regard tout en priant que son ami le rejoindra plus tard.
Une torche à la main et la lame dans l’autre, James se sent prêt à affronter les dangers de ce monde obscur. Il marche d’un pas décidé vers le refuge des humains. Une rage sourde l’envahie tandis que sa main serre de plus en plus fort le manche du couteau. Dans la précipitation, le crayon de James c’est brisé. Il le jette au sol car il n’a plus d’utilité. C’est ainsi que dans les ténèbres, vêtu de sa cape et armé d’une lame, James poursuit son aventure dans un monde de rats.
garni
Une aventure qui s’avère palpitante…On attend la suite avec impatience … gilberte .