Quelques mots sur les quais
Aujourd’hui je prends du recul pour reculer le temps, je prends la tangente, filante.
Je file les jours qui passent. Ils me cassent.
Je m’écarte, mouvante pour mieux laisser filer mon « tant ».
J’aimerais pouvoir redistribuer les cartes, mettre une pancarte à l’endroit où son horizon s’est fait la malle.
Aujourd’hui je sais qu’on peut mettre un horizon dans une malle et juste partir, s’enfuir à travers le temps en espérant le contrer mais on ne contre pas le temps en le laissant passer.
Alors vu que je ne peux rien y faire ou juste laisser faire, laissez-moi vous conter comment je rembobine mon amour assassiné.
Saranonyme embobinée sur les quais d’un métro, le métro c’est moche me direz-vous mais je trouve ça beau.
La Gare
Dans le métro,
J’ai perdu des morceaux de moi,
Dispersés entre les lignes, le long des voies.
Mon strapontin comme enclos de solitude,
D’ici je revois mon tout mais aussi mon rien.
Je compte entre les stations les chimères
Qui se sont envolées dans les airs
Comme on énumère le soir les moutons,
Dont on ne connaît ni le nombre, ni les noms.
Le métro avance sur son chemin de granit comme à son habitude
Et moi dans ma bulle je prends du recul,
La réalité s’effrite et je bascule
Sur ce sentier de songes où je songe
À tout ce temps qui passe où tu passes
Sans que mes sentiments ni ton image ne s’effacent.
Mes mots se diluent sur mon cahier,
Dans mon wagon, comme un peu de fumée
Au goût doux-amer du passé.
Je m’évapore et me disperse,
Dans ma tête je prends des chemins de traverse
Et je m’égare
Dans ton oubli et nos moments.
J’aimerais remonter et contrer le temps
Pour te retrouver au cœur de ta gare
Celle où tu t’es perdu, égaré entre les rails,
Ceux qui raillent
La beauté de l’âme et qui la font dérailler,
La renversent et la bouffent en entier.
Là j’aurais peut-être pu arrêter
Ton train en marche et l’empêcher d’avancer,
De s’abîmer et de se renverser plus encore,
T’aider à combattre les monstres qu’hier t’ont dévoré
Et qui aujourd’hui te mangent encore,
Leurs dire de me bouffer moi car tu es trop tendre et pas assez fort
Pour voyager ainsi tous les jours avec la mort,
De te laisser te relever des blessures de l’enfance
Et de te laisser trouver ta chance
Au lieu de tout t’enlever.
Mais le jour où je t’ai trouvé
Toi l’ange en civil,
Tu avais déjà mis ton pardessus et quitté la ville,
Un billet au creux de la poche et puis tu es parti.
Un matin de janvier ou bien était-ce l’après-midi ?
Je ne me souviens plus, je sais juste que tu l’as fait sans un mot
Et sans un bruit,
Dans le silence que le froid de l’hiver m’a imposé.
C’était il y a des mois mais pour moi c’était comme si c’était hier.
Aujourd’hui je continue mon voyage sans repères
Avec ton obscurité et le souvenir de ta lumière pour paysages.
Déjà mon arrêt.
Fin du voyage.
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