Le Pôle Hot
Par une soirée d’hiver James, le voleur d’instants, était bien au chaud : accoudé à cette table en bois et s’imprégnant d’un doux breuvage. Les regards s’égarent et se frôlent à vive allure dans le décorum d’un bar bon chic bon genre où le froid s’engouffre à chaque nouvel arrivant. C’est au son d’un tempo blues-electro que les superbes entrent : toutes plus reines noctambules les unes que les autres, en laissant dans leur sillage des rêves chaloupés tanguant à nos pupilles. En cet instant, James se délecte des rituels.
D’abord, l’entrée sur scène. Chacune est couverte d’épais textiles ayant bravé le froid qui se transforment en carapaces protégeant les chaleurs intérieures accumulées par les frottements de dentelles ciselées pour nos regards. Puis vient ce dévoilement : l’effeuillage brutal d’un manteau qui s’adosse sur une chaise dévoilant les courbures d’un dos, carte d’un monde dans laquelle James s’improvise cartographe.
Comme à son habitude, James s’écarte physiquement puis fend l’hymen de son imaginaire pour capturer les profils de délicates intentions qui se dessinent dans les buées suaves de bouches charnues et engourdies. Entre fraîcheur et chaleur, tout en mirant celles qui occupent l’espace, un théâtre de fantasme s’installe pour le pauvre spectateur trop libre d’interprétations débordantes.
James se pose sur les cils d’une des belles pour se laisser balancer au rythme charmeur d’un clignement de paupière puis il descend face à l’œil où se font les dilatations d’un cercle noir qui nous entraine vers l’infinie. Entre agrandissement et rétrécissement, James reste songeur sur de chères contractions plus basses délivrées par désir et plaisir. Se mettant sur le côté, il se cambre et se dresse pour plonger dans la fente de deux glaciers, gonflés par la chaleur, qui s’entrechoquent mais ne se brisent jamais au contact d’objets glissants ou saisissants. Plongeant vers ces rondeurs sublimes, James parcours ce ferme toboggan de chair pour chuter dans le bassin où règne l’entrecroisement de jambes trop évocatrices. Presque transpirant au contact d’un triangle incandescent fâché d’être habillé, James regarde au loin et effleure par sa marche la longueur de ces douces jambes entrelacées. C’est à la rotule qu’il s’arrête pour contempler un précipice érotique offert par un dénudement jusqu’au pied. Vient enfin le support : les talons de l’incroyable créature qui produisent cette image de rondes-fesses-pêches roulantes dessinées par l’écho de pas qui claquent puis résonnent au sol.
Passionné d’escalade, James remonte en haut pour se stopper sur l’orifice rouge vif lançant plusieurs invitations. Dans le pli des deux lèvres, James distingue une pression lente et gracieuse infligée à une longue tige ce teintant des restes d’un rouge à lèvre humide duquel suinte la dernière goutte d’un délicieux liquide. La main se resserre sur le dur récipient de verre rempli. Dans ce va et vient, James entrevoit une grande descente : la contraction d’une gorge rapide ; suggestion d’un pêché de gourmandise. A l’agonie de cette gloutonnerie, vidé, quelques mots suffisent à James pour recommander et observer, encore une fois, cet instant subjugué d’une merveilleuse dont on fantasme l’avidité.
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