Loufoque interview
Tandis qu’il errait, James tomba nez à nez sur un micro. Un objet bien curieux au beau milieu des chemins tortueux de ses aventures. A pas de loup, il s’en approche et entend une voix :
- Bonsoir, bonsoir ! Et bienvenu ! Enfin vous y êtes, nous vous attendions. Tout le monde est impatient de vous entendre. Alors mon cher James, qui veut en savoir plus ?
- Heu… Répondit James sur un ton douteux.
- Ne soyez pas timide. Première question. James, quel est l’année de votre naissance ?
- Vous voulez dire quand est-ce que je me suis exprimé pour la première fois ?
- En 1995. J’étais déjà là avant mais à l’époque, je ne parlais pas.
- Vous êtes né muet ?
- On peut dire ça.
- Qu’est-ce qui vous a poussé à parler ?
- Je n’ai pas vraiment eu le choix, il le fallait. C’était une nécessité sinon… James se tait.
- Sinon quoi ?
- Non, ce n’est rien…
- Question suivante. Où avez-vous grandi ?
- Sans réfléchir, je dirais dans un trou. Mais au fond de celui-ci, il y avait mille et une choses, j’avais de quoi m’occuper. Je me suis nourri au fils des années puis je suis apparu comme vous, là, devant moi.
- Quels-ont été vos premiers mots ?
- De mémoire, je dirais : « Ne t’inquiètes pas ça ira, laisse moi faire. ».
- A qui disiez-vous ces mots ?
- Je ne peux pas le dire, ce serait trahir.
- Qui ?
- N’insistez pas.
- Très bien… Le temps a du vous paraître long ?
- Oui, en effet.
- Vous vous occupiez comment ?
- J’étais assis sur un banc ou sur une chaise ou dans une petite cage. Là où j’étais, il y avait toujours un faisceau lumière blanche. Je lisais beaucoup. J’écoutais. J’observais puis de temps en temps je disais quelques mots.
- Vous parliez seul ?
- Il y avait quelqu’un. Il y avait l’autre.
- Qui ça ?
- C’est difficile à expliquer. Peu de gens comprennent.
- Essayez ?
- Non, je suis fatigué de parler.
- Pourtant c’est votre interview. Tout le monde veut savoir James ! Allez dites nous tout, d’où venez-vous exactement ?
- Je vous l’ai dis, je ne peux pas répondre. Je n’ai pas toutes les réponses sur ma naissance. Est-ce que j’ai toujours été là ? Qui m’a enfanté ? Comment suis-je arrivé là où j’en suis ? Est-ce que j’ai réussi ? Ai-je toujours bien fait ? Je ne sais pas… Je ne sais plus… James s’énerve et panique.
- Vous me volez mon travail à force de vous poser mille questions.
- Peut être mais il vaut mieux que ce soit moi qui me pose ces questions.
- Vous mangez beaucoup ?
- Très peu.
- Vous buvez ?
- Oui.
- Vous aimez boire ?
- Oui, les mondes aqueux m’ont toujours attiré.
- Pourtant tout est sec ici ?
- Comment ça ?
- Les roches, les pierres, le gravier, la terre. Tout est aride autour de vous ?
- C’est vrai. J’ignore si ce monde a besoin d’un assèchement de plus ou bien d’être arrosé.
- Vous avez peur ?
- Toujours.
- De quoi avez vous peur ?
- De grossir. J’aime ma fragilité, j’y tiens. C’est ce qui fait mon agilité.
- Cette cape, qui vous l’a donné ?
- Je l’ai trouvé.
- Quand ?
- Il y a quelques temps, suite à une chute. Il y avait ce trou énorme. Quelque chose qui me rappelait d’où je viens. Happé par celui-ci, j’ai chuté et après un choc, je l’ai trouvé.
- Vous redoutez d’apparaître ?
- Etant un être à part, oui j’ai peur de me dévoiler même si plus d’une fois vous m’avez vu au fond d’un regard sans vraiment réussir à me distinguer. Je reste discret.
- Qu’est-ce qui tape comme ça ?
- Quelque chose qui a été scellé. Libéré une fois puis renfermé, c’est ainsi que les choses doivent arriver.
- Vos chaînes sont solides ?
- J’ai aidé à les poser mais je n’en suis pas l’architecte.
- Qui est-ce ?
- N’insistez pas !
- Dites nous !
- Taisez vous !
- Allez, tout le monde veut savoir !
- Foutez moi la paix !
- Ok.
- … James se tait à nouveau.
- Si les chaussettes de l’archiduchesse…
- Sont elles sèches, sont elles sèches ? Ou archi sèches ?
- Vous êtes très fort…
- J’ai de la réparti.
- De la défiance ?
- Dans ce monde, oui il en faut.
- Ca fait combien de temps ?
- Quoi ?
- Que ce dialogue dur ?
- Je vous l’ai dis : 1995.
- Vous devez en savoir long ?
- Oui mais je me tairais et si vous vouliez bien cessé cet interrogatoire, j’en serais ravit car la route est longue.
- Elle a toujours été longue ?
- Quoi ?
- La route.
- Elle le sera toujours. L’important c’est de marcher.
- Au loin…
- Peut être ?
- La ville.
Leave a Reply